A la découverte du vin de Porto

Je n’aime pas le Porto. Enfin, plus exactement… je n’aimais pas le Porto ! En effet, si la France en est le premier importateur au monde, le Porto que Mémé nous sert… chaud ne m’a jamais transporté. Je trouvais même ça dégueulasse pas très bon. Et puis… tout a changé.

Porto Ramos Pinto

A la faveur d’une dégustation avec le sommelier Manuel Peyrondet, j’ai découvert que bien choisi, cela pouvait être bon, et même très très bon… C’est la raison pour laquelle j’ai accepté de partir en voyage de presse à Porto, afin d’en apprendre davantage.

A propos

Bienvenue sur Turbigo-Gourmandises ! Je m’appelle Sophie Seïté et j’ai créé ce blog de cuisine en 2011 pour partager mes recettes avec mes amis, ma famille et plus si affinités ! Au fil du temps, il est devenu le cœur de mon activité et s’est enrichi de plus de 2000 propositions gourmandes, dont les ingrédients privilégient la saisonnalité et la provenance locale. Je prends beaucoup de plaisir à mitonner des petits plats et autres desserts puis à les publier dans cet espace depuis ma Bretagne natale. Bonne découverte…

Il était organisé à la faveur des 260 ans des vins de Douro et de Porto, au mois de septembre dernier. J’ai mis un peu de temps à vous en parler et pourtant, j’ai vraiment adoré !

Portologia à Porto

A notre arrivée à Porto, nous avons commencé par un arrêt chez Portologia : Julien Dos Santos est à la tête de cet établissement destiné à promouvoir le porto, comme son nom l’indique.

On peut y déguster une très large gamme (de portos mais aussi de vins), organiser des évènements privés, prendre des cours d’œnologie, mais aussi se régaler, comme on peut le voir sur la photo ci-dessous.

A cette occasion, j’ai d’ailleurs découvert qu’il y a également une boutique à Paris… à deux pas de chez moi. Et comme je suis d’humeur généreuse, je vous donnerai l’adresse à la fin de cet article 😉.

Portologia

Plateaux de fromage, de charcuterie et même les fameux Pasteis de nata, Portologia fait bien évidemment la part belle à la gastronomie portugaise.

Portologia

Le Porto est un vin d’assemblage, avec 6 principaux cépages qui sont le touriga nacional, le tinta roriz, le touriga franca, le tinta barroca, le tinta amarela et le tinta cão. C’est un vin muté, on y ajoute de l’alcool pour stopper la fermentation.

Il a été créé au XVII° siècle, par accident : il s’abimait lors du transport vers l’Angleterre et c’est pour tenter de le stabiliser qu’on commença à y ajouter de l’eau de vie de vin, jusqu’à constater que cela donnait un excellent résultat.

L’IDVP, Institut Des Vins de Porto a été créé en 1933, c’est un organisme public chargé de contrôler la production. 7 à 8000 échantillons sont testés par an, et les vins de Douro le sont également depuis 2003.
 Le goût des produits doit être respecté, conformément au cahier des charges. Les produits sont également testés pour déceler d’éventuelles traces de plomb, etc.

Cela se passe au sein de chambres de dégustation professionnelle. Elles sont blanches et d’une température de 20°C.
 Il y a 7 dégustateurs maxi par session. 


Les résultats de dégustation sont contrôlés, y compris pour confirmer la crédibilité du dégustateur (celui-ci reçoit initialement une formation de 6 mois minimum et il peut y avoir une formation complémentaire si une faiblesse est révélée dans sa connaissance d’un des types de Porto).


Les dégustateurs sont choisis en interne, parmi le personnel qui est composé d’œnologues, de microbiologistes et de biologistes.
Lors d’une dégustation, 10 Porto ou 13 vins de Douro maximum sont testés.

Il existe trois types de Porto : le rouge, le blanc et le rosé. Le Porto blanc, qui peut être doux ou sec (extra-dry, dry, half-dry, half-sweet, sweet ou Lagrima) selon le degré de sucres résiduels, se boit très frais, tout comme le Porto rosé – qui lui se boit jeune (et existe depuis peu) !

Les Portos rouges se déclinent en deux catégories : les oxydatifs ou Tawny (qui ont été exposés à l’oxydation durant leur élevage) et les réductifs ou Ruby (qui ne l’ont pas été).

Le Porto Tawny est un assemblage de différents millésimes, qui n’évolue pas ou peu après sa mise en bouteille.

Le Porto Ruby est un assemblage de vins jeunes qui va passer de 2 à 6 ans en fûts avant d’être embouteillé. Il doit son nom à sa couleur rouge vif. C’est le plus commun et le moins onéreux.

Le Porto Vintage est le plus exceptionnel des Portos et surtout, celui d’une seule année (un Ruby, donc). Une Quinta (nom d’un domaine) peut déclarer vintage une année qu’elle considère exceptionnelle. Si plusieurs Quintas font cette démarche, seule l’IDVP est habilité à déclarer l’année Vintage, ce qu’elle fait au maximum 3 fois par décennie. Une fois que la bouteille est ouverte, il ne se conserve pas, contrairement aux autres Portos.

Le Porto Colheita est issu d’une seule vendange (un Tawny, donc) et vieillit en cuve pendant 7 ans. Au même titre qu’un Porto Vintage, c’est un Porto exceptionnel et c’est également l’IDVP qui labellise la cuvée.

Le Porto Late Bottled Vintage (LBV) est récolté en vendanges tardives et est, en termes de qualité, juste en dessous du Vintage. Il vieillit en fût pendant 3 à 4 ans. Ce Porto de type Ruby a été créé pour rentabiliser les invendus, puis est devenu une catégorie à part entière.

Le Porto Crusted, aussi appelé “Vintage du pauvre” était un assemblage des fonds de barriques, pratique aujourd’hui quasiment disparue.

A savoir : les qualités organoleptiques et l’acidité volatile sont plus importantes dans un vieux Porto. 40% des vins de Douro partent à l’exportation, ainsi que 25% de la production du Porto.

Portologia

Après cette pause gourmande chez Portologia, nous avons arpenté les rues de la ville pour nous rendre à Vila Nova de Gaia, chez Ramos Pinto où nous avions rendez-vous.

Située sur les bords du Douro, Porto est la seconde plus grande ville du Portugal après Lisbonne. Le cœur de la ville bat autour du fleuve et c’est un régal pour les yeux.

Porto

Nous sommes passés sur le pont Dom Luis, conçu par un disciple de Gustave Eiffel – Théophile Seyrig – tout comme le pont Maria Pia situé un peu plus loin. Il est aussi célèbre pour les hardis plongeurs qui se jettent dans le Douro depuis le bord du pont.

Porto
Pont Dom Luis à Porto
La vue depuis le le pont Dom Luis
Porto

Nous avons donc été reçu chez Ramos Pinto pour une visite guidée et une vraie plongée dans le passé. Une partie du bâtiment est en effet transformée en espace muséologique, avec tous les meubles et décorations d’époque.

L’histoire de la maison est émaillée d’anecdotes et riche d’innovations apportées par Adriano Ramos Pinto son fondateur, un vrai visionnaire.

Jorge Rosas Directeur Général de la maison Ramos Pinto
Jorge Rosas Directeur Général de la maison Ramos Pinto

Il a créé la maison Ramos Pinto en 1880. Animé d’un esprit d’entreprise et pionnier dans son domaine, il a même été un as du marketing bien avant notre époque !

Son tout premier objectif fut d’exporter le vin de Porto vers l’Amérique du Sud, et plus précisément le Brésil. Il apporta un soin tout particulier à l’emballage de ses produits afin qu’ils se distinguent lors de leur mise en marché.

Ainsi, il le commercialisait à un prix qui pouvait être deux fois plus élevé que celui de ses concurrents. Il n’en oubliait pas pour autant la qualité des produits, indispensable pour durer.

Le Porto y était commercialisé sous la marque Adriano, qui est restée si célèbre au Brésil que lorsque l’on veut s’en faire servir un verre, on demande un Adriano !

Bureau chez Ramos Pinto

Très tôt, Adriano Ramos Pinto a compris qu’il fallait marquer les esprits par l’image. Il s’est adjoint les services de nombre d’artistes pour faire réaliser des affiches publicitaires où, bien souvent, les jeunes femmes étaient légèrement vêtues, le tout sous couvert de scènes mythologiques… histoire d’éviter la censure et les foudres des bien-pensants.

Les panneaux d’Azulejos ci-dessous ont été initialement commandés pour l’Exposition Internationale de Rio de Janeiro.

publicité Ramos Pinto

Il fit également fabriquer des objets publicitaires – les fameux cadeaux d’entreprise : tire-bouchons, canifs, coupe-papiers, bloc-notes, calendriers, etc. afin de rester toujours à la vue de ses clients…

Bureau chez Ramos Pinto

Le vitrail ci-dessous a été réalisé à Paris vers 1900 et l’on peut noter la délicate et minutieuse calligraphie Art Nouveau :

Ramos Pinto

Depuis son origine, la Quinta Ramos Pinto n’utilise que ses propres raisins et, comme chacun sait, pour faire un grand vin, il faut de grands raisins ! Ils ont 2 centres de vinification 1 à Porto et l’autre à Douro. 


C’est d’ailleurs le précurseur du vin sec à Douro.
 Les vins de Porto sont vieux de seulement 200 ou 300 ans et les vins mutés, très récents. Ramos Pinto a la plus ancienne appellation LBV (Late Bottled Vintage) dont a connaissance l’IDVP (Institut du vin du Douro et de Porto).

Nous avons, bien évidemment, terminé notre visite par une agréable dégustation.
En 1990, l’entreprise a été rachetée par la maison de champagne Roederer.

Porto Ramos Pinto

Parmi les expériences magiques de ce voyage, nous avons participé à une masterclass menée par Bento Amaral, un éminent œnologue et sportif, devenu tétraplégique il y a de nombreuses années après un accident à la plage.

dégustation Bento Amaral
Mes fonds de verre après la “3 centuries of Port masterclass” : notez les différences de couleur incroyables.

Nous avons démarré par un Dow’s vintage de 2011 puis nous avons dégusté… jusqu’au Very Old Port de la Quinta Bulas.

Les Porto qui ont cette dénomination ne sont pas datés. Ce dernier – selon Bento Amaral – ne devait pas être antérieur à 1870. Vous trouverez ci-après la liste des Porto dégustés et les notes prises ce matin-là.

  • Dow’s vintage 2011 Symington
  • Noval vintage Nacional 1996 / notes épicées, de poivre et même de céleri (inhabituel). Un Porto très puissant en bouche. 1996 n’est pas une année déclarée vintage.
  • São Pedro des Águias Vintage 1987 / un Porto doux et sucré, une concentration de sucre et d’acidité bien équilibrée. Certaines personnes pensent que cette année aurait dû être déclarée Vintage.
  • Fonseca Vintage 1985 / Globalement les Porto de 1985 on été assez décevants, mais pas celui-là. On y trouve des notes de noix de coco, de cassis, de cigare ou encore de cassis. Les vendanges ont été réalisées dans les conditions idéales. C’est un Porto qui a de vraies capacités de vieillissement.
  • Cruz Colheita 1985 / Il a été mis en bouteilles en 2015 et a des notes exotiques, de marmelade et de noix.
  • Ramos Pinto Vintage 1983 / 1983 a été une année anormalement froide, puis très chaude en septembre, au moment des vendanges. Les vins de cette année ont la réputation d’être particulièrement tanniques. On retrouve dans celui-ci des notes de confiture, de fruits rouges, de tabac et de sous-bois.
  • Real Companhia Velha Colheita 1977 / Ce Porto a été mis en bouteille en 2012 et est comparé en stature à un Porto de 1963. Il a des notes d’algues et est très équilibré. Il est vendu au prix de 80 €.
  • Andresen Colheita 1968 / Cette compagnie a été fondée par un Danois qui voulait aller en Amérique du Sud. Les Porto de cette maison ont la réputation d’avoir l’air plus âgés qu’ils ne le sont à la dégustation. Il est difficile de savoir de quels types de raisins ils sont issus. Celui-ci tend probablement davantage dans la puissance que dans l’élégance. Il a été embouteillé en 2015.
  • Poças Colheita 1967 / Il ressemble à un Porto blanc mais c’est un Colheita. On y retrouve des notes de marmelade et de fleurs. Il est frais et délicat.
  • Dalva Colheita Branco 1963 / Cette marque appartient à la Martiniquaise. C’est une excellente année. Notes de pain, beaucoup d’alcool s’est évaporé. Il a été embouteillé en 2015.
  • Ferreira Vintage 1952 / Il a bien vieilli, spécialement pour un vieux Porto d’une année n’ayant pas été déclaré Vintage. Il est délicat et bien équilibré avec des notes florales, de miel, de boite à cigare. Il est prêt à boire maintenant.
  • Niepoot Colheita 1952 / C’est une catégorie particulière, il a été mis en bouteille en 1987 et a vieilli ainsi depuis. Il est complexe en bouche avec des notes de marmelade et de miel.
  • Bordes Vintage 1935 / C’est un format de demie bouteille, 37,5 cl qui a été notamment bu à l’occasion du couronnement de George VI. Il en reste peu de bouteilles, c’est un Porto rare dont le goût n’est pas celui auquel on s’attend : mélasse, fruits confits. Il est prêt à boire et n’a pas les arômes habituels du Porto Vintage.
  • Kopke Colheita Branco 1935 / De style sec, à déguster à la fin d’un repas ou en entrée, avec un foie gras. Il a des notes de vanille, de marmelade, de vieilles racines. Son acidité rafraichit le palais.
  • Bulas Very Old Port (2nd half / metade XIX) / à déguster avec modération…!

Inutile de vous préciser que ce fut une expérience vraiment inoubliable.

Bento Amaral n’a pas manqué de nous faire réfléchir au nombre de personnes qui ont travaillés durant ces décennies pour que nous ayons le privilège de boire ces Porto… “C’est la magie des hommes de transformer de ce que la nature offre”.

“Le Porto est un don de la nature”. Pour lui,  un “Porto en bouteille est comme un cheval domestiqué”…

dégustation Bento Amaral
dégustation Bento Amaral
Julien Dos Santos de Portologia, Bento Amaral et Sylvie Deroire, journaliste
Masterclass porto 3 centuries
Les 3 derniers Porto dégustés…

Vous pouvez retrouver la suite de cette visite ICI, avec notamment la découverte de la vallée du Douro : magnifique !

Porto Cruz

Portologia
42 Rue Chapon, 75003 Paris
Téléphone : +33 9 52 59 22 29

552, R. de São João 28, 4050 Porto, Portugal
Téléphone : +351 912 538 219

Quinta Ramos Porto
Av. de Ramos Pinto 380, 4400-266 Porto, Portugal
Téléphone : +351 22 370 7000

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